Vini, un poète charismatique au trac terrible, et Tito, un guitariste talentueux et charmant, sont deux petites souris qui, au moment du déluge universel, tentent de contourner les règles d'embarquement de l'Arche de Noé pour monter à bord et sauver eux-mêmes. Avec l'aide d'un ingénieux cafard et un peu de chance, Vini et Tito se faufilent sur l'Arche. Ils doivent maintenant survivre pendant 40 jours et 40 nuits, en essayant d'apaiser les tensions qui se créent entre les animaux à travers leur musique et leur poésie.

Fonder le récit sur l'Arche de Noé ne signifie pas seulement réitérer les structures iconographiques sur lesquelles il s'appuie, ni reproduire ses trajectoires " narratives " : Il s'agit plutôt d'adhérer à l'anthropocentrisme qui traverse tout ce segment biblique et de relier les figures animales - et donc anthropomorphisées - sur lesquelles convergent les intrigues du récit à des thèmes qui renvoient au monde terrestre, ainsi qu'à l'univers des valeurs, des idées - et peut-être même des pulsions - qui caractérisent la sphère émotionnelle/identitaire de l'individu. C'est à partir de cet ensemble de tensions et d'inférences (culturelles, mais aussi thématiques) que les deux cinéastes brésiliens Sérgio Machado et Alois Di Leo déclinent les instances de ce Tito et Vinni à toute allure. Au point que le film d'animation doit être compris comme un véhicule permettant de charger les images de l'Arche de la Bible, et en particulier les "corps" des races animales qui l'habitent, de connotations purement allégoriques : de manière à observer les figures des protagonistes, en pleine continuité avec le récit biblique, comme le miroir et le reflet des activités, des idiosyncrasies et des distorsions auxquelles les hommes tendent à l'intérieur du système sociétal dans lequel ils sont immergés. Ce n'est pas un hasard si le film, basé sur le poème A Arca de Noé composé par Vinicius de Moraes - lui-même inspiré du récit biblique auquel il emprunte l'histoire - place d'emblée ses protagonistes anthropomorphisés comme moyen de réflexion sur la sphère morale et éthique de l'homme : Titus et Vinni, deux petites souris unies par la passion du chant, assistent par hasard au moment où Dieu ordonne à Noé de commencer la construction d'un grand vaisseau destiné à abriter un couple de toutes les espèces animales, afin de les préserver de l'arrivée du Déluge universel. Mais en tant que porte-parole du sexe "mâle" de la classe des rats, les deux rongeurs Titus et Vinni, à pleine vitesse, ne peuvent espérer débarquer tous les deux sur l'arche. Ils décident donc d'embarquer secrètement sur le navire, où les attend une "humanité" corrompue et égoïste, prête à sacrifier son prochain pour exercer sa domination sur l'autre. Et tant que Tito et Vinni raisonnent à plein régime sur ces instances, déclinant la fraction initiale de l'histoire à l'observation des conflits dans lesquels les animaux (et par extension, les êtres humains) sombrent dès lors qu'ils sont placés devant leurs propres intérêts égoïstes, il conserve concrètement son lien avec le matériau d'origine. Mais c'est à l'instant où le film commence à jouer avec les langages plus ludiques de l'animation populaire - en particulier ceux calibrés pour un public enfantin - que les deux cinéastes perdent le fil du discours, aboutissant à un récit non seulement extrêmement alambiqué et décentré, mais qui noie les thèmes universels du conte dans une intrigue confuse et narrativement effilochée. Incapables, une fois engagés dans cette voie, d'inverser le cours d'une dérive de plus en plus brutalement inexorable.