Le journal de mon père (Chichi no Koyomi) est un ouvrage unitaire publié au Japon aux éditions Shogakukan. Le livre s'ouvre sur quelques pensées d'enfance de Yoichi Yamashita stimulées par un appel téléphonique au travail, l'informant de la mort de son père. Ainsi, il retourne dans sa ville natale après une absence de plus d'une décennie au cours de laquelle il n'a pas vu son père. Mais alors que les parents se réunissent pour les funérailles et que les histoires commencent à couler, l'enfance de Yoichi commence à refaire surface. Les après-midi de printemps à jouer sur le sol du salon de coiffure de son père, l'incendie qui a ravagé la ville et sa maison familiale, le divorce de ses parents et une nouvelle « mère ». Au fil des confidences et des souvenirs partagés avec ceux qui l'ont le mieux connu, Yoichi redécouvre celui qu'il a longtemps considéré comme un père absent et plutôt froid.

Pour la première fois, ce manga est publié en version originale en France (donc avec un sens de lecture inversé). A l’annonce du décès de son père qu’il n’avait plus revu depuis 15 ans, Yoichi retourne dans sa ville natale, Totorri, au milieu des siens perdus de vue. A travers un récit intimiste, au grès de non-dits et de sentiments suggérés, Jiro Taniguchi pose la question de la paternité, de la transmission, du fossé générationnel, de l’amour filial, de l’incompréhension, de la mort. Yoichi se remémore les souvenirs douloureux, causes de la quête d’éloignement obsessionnelle de ses racines familiales. L’adulte redevenu enfant se rappelle : un père taiseux et distant, la séparation, l’abandon supposé d’une mère au divorce de ses parents et qu’il reproduit pourtant par la suite sur son chien. Les chagrins et les blessures de l’enfance, les certitudes et les jugements péremptoires de l’âge mûr, le tourbillon d’un début de vie professionnelle dans une métropole bourdonnante en parallèle d’une fin de vie dans une ville de province… évoqués à travers le prisme pudique du taoïsme et des liens familiaux japonais. Finesse et précision des dessins réalistes telles des gravures dans lesquelles tout est ordonné, propre, géométrique, millimétré. Nuls autres personnages que ceux du strict cercle familial. Les rues sont vides et Tottori semble figée mais aussi rassurante et accueillante. Les visages sans aspérités, poupons et carrés rendent l’identification par le lecteur aisée.