Éduqué en Angleterre, Thomas Moore débarque dans le Far West à la mort de son père, un vicomte anglais qui avait fui outre-mer des années auparavant. Son problème ? Il paraît trop respectable, ne porte jamais d’arme et préfère le vélo à l’équitation. Il se retrouve en compétition avec un chef de troupeau pour conquérir le cœur de la belle Candida Olsen, et finit par céder et apprendre à se servir d’une arme. Le titre pourrait laisser penser à une suite de la série Trinita, mais il n’en est rien, d’autant plus que Bud Spencer est absent. Cela dit, cela n’a pas grande importance.

L'inventeur de Trinita, et donc du western comique, aiguise ses armes et poursuit le succès de son œuvre, même sans le producteur Zingarelli et Bud Spencer. Terence Hill, Riccardo Pizzuti et tous les grands cascadeurs de l'époque sont de retour. Pour la plupart, c'est un film truffé d'incohérences, où la patte du réalisateur est imperceptible. Je crois pourtant que, malgré une mise en scène inhabituelle, Barboni a su tirer le meilleur parti d'un matériau peu glorieux. En effet, comme ce sera le cas par la suite, les tentatives de remplacer Bud Spencer, Terence Hill et, bien sûr, le duo Bud et Terence sont assez pathétiques et vaines, car elles ne font que nous faire regretter la perfection de Pedersoli-Girotti. Mais si l'on fait abstraction de l'absence du géant italien, on découvre des dialogues et des répliques d'une grande force, dans le plus pur style Barboni, tout comme de nombreuses situations recréées dans ce style, notamment les bagarres de Bud et Terence. Il est facile de remarquer que personne ne meurt dans le film et qu'il n'y a pas la moindre trace de sang. Le méchant de service, Pizzuti, est assommé d'une gifle. Le film rappelle un peu, ou du moins semble rappeler, « Il était une fois dans l'Ouest » de Barboni, avec quelques tentatives d'une nostalgie amère qui auraient mieux convenu à un film plus sérieux. Mais même une comédie de ce genre peut réserver d'agréables surprises. En effet, malgré un ton simpliste, le contraste entre le gentleman anglais et les cowboys rustres de l'Ouest ridiculise les artifices narratifs et les aspects culturels du western que l'on tient généralement pour acquis. Avant de devenir un pistolero, Terence Hill démontre à satiété l'inutilité de l'usage des armes : il se déplace à vélo plutôt qu'à cheval, s'étonne qu'une fille doive demander la permission à son père pour emprunter des livres et, surtout, il ridiculise les manières primitives d'appréhender chaque aspect de la vie quotidienne. Quant aux bandits, bergers et ivrognes, ils restent imperturbables face à leur monde. Un monde qui s'achève, et l'amertume avec laquelle Barboni souligne ce déclin est toujours atténuée par la verve comique irrésistible des trois protagonistes, dont le caractère est tout simplement exceptionnel. Bud Spencer, bien sûr, est meilleur ; son caractère bourru est devenu culte et indémodable, mais Gregory Walcott s'en sort également très bien, peut-être aidé par Glauco Onorato, la voix fétiche de Bud. Mais surtout, Harry Carey Jr., interprété par Ford, est impressionnant, ayant magnifiquement vieilli. Terence Hill, lui, semble oublier ses rôles précédents à la manière de Clint Eastwood, ou peut-être de Franco Nero, compte tenu de la ressemblance qui lui a permis d'incarner le véritable Django dans « Prépare ton cercueil ! » de Baldi, et de perpétuer ainsi ce nouveau personnage picaresque archétypal qui l'accompagnera tout au long de sa carrière.