Vème siècle dans l'actuelle Grande Bretagne. Alors que le Roi Arthur mène ses illustres chevaliers vers la pacification des peuples de Britannia et la foi en un dieu unique, grandit au loin sur l'île de Non-Sachante le jeune Sivar. L'orphelin de mère aux yeux vairons doux et droit va au devant de la vérité sur sa véritable naissance. Fils d'une des dernières Seidkonas, il se doit d'embrasser son destin et se dirige vers Camelot pour proposer à Arthur son bras armé et découvrir enfin le Graal. Mais il est seul à voir certaines choses, et dans l'ombre tapie patiente Morgane qui le suit, le sent et le veut aussi. "Le Chevalier au Dragon" a été créé comme une bande dessinée d'aventure dépouillée de toutes les conditions postmodernes et des modes contemporaines. C'est l'histoire d'un Celte découvrant que sa mère est une sorcière. Il est difficile d'imaginer une représentation plus exemplaire de l'héroïsme, des éléments du Moyen Âge et de la fantaisie classique (sauf peut-être les peintures à l'huile de Frazetta).

Il ne s’agit pas d’une histoire originale, mais « primordiale », constituant le fondement du genre fantastique. De plus, l'album ressemble davantage à une vulgarisation d’années de recherche, d’exploration et de reconstruction dans les études médiévales. Emanuele Arioli, sorte d'homme de la Renaissance, acteur franco-italien, auteur de livres, admirateur du Moyen Âge et professeur à l'École Polytechnique, a passé treize longues années à chercher son propre Graal. La découverte d'un manuscrit l'a fait se lancer dans la recherche d'une vie : la découverte d'un chevalier de la table ronde inconnu. Partir à la recherche de cette partie manquante de l'histoire et nous la délivrer, à nous profanes, à travers cet album (romancé pour la narration) est un vrai cadeau. Car l'histoire, la quête, l'énigme n'existent que si elles sont racontées, partagées. Quelle part de lui même a-t-il mis dans le jeune Sivar ? Nous ne le savons pas. Mais faire le lien entre sa quête et celle du jeune chevalier est intéressant. Ajouter aux légendes Arthuriennes ce nouveau visage et cette nouvelle quête, retrouver et pourtant redécouvrir Morgane, Merlin et d'autres figures illustres de cette épopée ont été un plaisir empli de passion. Quant à Emiliano Tanzillo (Dylan Dog), il est à nouveau parfait. Son trait si émouvant, ici épique, que nous avions tant aimé dans Carambolla nous a à nouveau ému ici. Les regards qu'il insuffle à ses personnages et les sentiments qui transpirent de ses pages sont parfaits. Un dessin qui a une âme, pour un récit sorti de 700 ans de silence qui ne demande qu'à être raconté. Une curiosité particulière à la frontière de l'anthropologie, de l'histoire et des études littéraires. Une évasion dans un monde exempt de grisaille et de relativisme.