Automne 1040. Au cours de son histoire, la Sicile a subi le joug de nombreux maîtres (Grecs, Carthaginois, Romains, Byzantins et enfin Arabes). Cependant la conquête musulmane de l'île n'est pas totale et le pouvoir de l'émir de Palerme s'avère contesté de l'intérieur. Désireux d'exploiter ces faiblesses, le basileus Michel IV espère ramener la Sicile dans le giron de Byzance. L'Empereur a ordonné à son meilleur général, Maniakès, d'entamer la reconquête, mais après quelques succès, l'armée grecque piétine devant les murs de Syracuse. Maniakès confie à son second, Harald, chef de la puissante garde varangienne, de prendre la ville de Taormine. Après ce succès triomphant, Maniakès ordonne aux troupes d'Harald d'attendre son armée à Catane, alors que se prépare la bataille de Troina. L'émir de Syracuse dispose encore de forces conséquentes et il faudra une coalition hétéroclite pour espérer le faire tomber. Alors que Tancrède et Harald sont devenus frères d'arme, au grand dam de Guillaume, Maniakès pourrait bien manipuler tout ce petit monde pour arriver à ses fins, c'est à dire récupérer l'or des caïds qui a déjà fait tourner la tête de beaucoup d'armes, à commencer par le prêtre Étienne qui se retrouve en bien mauvaise posture.

Le duo Vincent Brugeas/Ronan Toulhoat (Le Roy des Ribauds, Block 109, etc) se reconstitue à l'occasion d'une série historique. Beaucoup de questions nous interpellent sur le réel but que poursuit Tancrède dans cette mission menée par l'Église. La mise en place des événements s'avère très efficace et le récit débute en force avec un groupe de mercenaires qui fait rapidement parler les muscles. La structure en analepse intègre de longs passages nous relatant les préparatifs de la bataille, une préparation que ne renierait pas les stratèges de Game of Thrones avec de nombreux coups bas à tous les étages. Le "héros" de cet opus est cette fois le diacre Étienne, enfermé dans une cage, qui distille des réflexions très intéressants sur le monde actuel, alors que la bataille entre byzantins et maures est déjà dans tous les esprits. Le passé de Tancrède reste encore des plus mystérieux dans ce tome, le scénariste Vincent Brugeas dévoilant avec parcimonie les informations nécessaires pour comprendre les agissements du personnage. Les dessins de Ronan Toulhoat sont parfaitement à l'unisson, offrant des personnages riches en nuances, des décors prodigieux et une mise en scène très harmonieuse. Du côté des couleurs, la tonalité évolue selon la période visitée : façon sépia dans le passé, vives à l'époque présente, et sanglantes dans les scènes d'action.