Quels que soient ses autres talents, Mark Millar est particulièrement doué pour exprimer ce à quoi ressembleraient les bandes dessinées de super-héros si elles faisaient réellement partie du divertissement grand public. On peut dire que c'est ce talent qui a fait des super-héros (au cinéma du moins) le produit le plus grand public et le plus rentable d'Hollywood. Et tout commence avec The Ultimates.  Cette réimagination en réalité alternative de la gamme de super-héros de Marvel, défait la continuité établie et la raconte comme si c'était "La Mémoire dans la peau" (The Bourne Identity). Ce premier livre nous emmène de la disparition apparente de Captain America en 1945, en passant par la formation des Ultimates - une équipe présidée par le général Nick Fury (ici sous les traits de Samuel L. Jackson) - jusqu'à Hank Pym (Giant-Man) qui s'en prend à sa femme Janet (la Guêpe) après qu'elle ait remis en question ses prouesses scientifiques. Au milieu de tout cela se trouve la seule véritable action, lorsque la puissance combinée des Ultimates, avec l'aide de Thor, se réunit pour vaincre un Hulk chargé de super-sérum.

En vérité, il n'y a pas grand-chose d'accompli dans cette première collection, du moins en termes d'intrigue. Ce qu'il fait cependant, grâce à une caractérisation insolente, une abondance de références à la culture pop et un rythme cinématographique, c'est donner au genre super-héros un sentiment de vitalité et de pertinence - et c'est une lecture extrêmement libre.  Millar a une sensibilité impeccable pour les superproductions, mais c'est sans doute le dessinateur Bryan Hitch et l'encreur Andrew Currie qui fournissent le super sérum du titre. Il y a une abondance de cadres sur grand écran et une utilisation massive de la caméra. Tous les personnages sont décrits comme s'ils pouvaient exister dans le monde réel (beaucoup d'entre eux ressemblent en fait à des acteurs du monde réel) et le sens inébranlable du détail de Hitch est magistral.