Scénario : Arnaud Delalande
Dessin : Éric Liberge
Berlin, 25 septembre 1920. Fritz Lang n'est pas encore un réalisateur célèbre, mais ses expériences combinant le nouveau courant artistique (l'expressionnisme) et les histoires populaires sont couronnées de succès et lui confèrent une certaine notoriété. Sa relation amoureuse avec Thea Von Harbou, écrivain et scénariste, épouse de l'acteur Rudolf Klein-Rogge, est bien connue ; la seule personne qui semble ne rien savoir est la femme de Lang, Lisa Rosenthal, qui les surprend tous les deux en pleine “action” ; désemparée, elle s'enfuit et, quelques minutes plus tard, se suicide dans la salle de bains, se tirant une balle dans la poitrine avec le revolver de Lang, un souvenir de la Première Guerre mondiale.
Le roman graphique d'Arnaud Delalande (Surcouf, Le dernier Cathare, Les reines de sang) réexamine la période allemande de la vie de Fritz Lang, en partant de cet épisode troublant qu'il définit comme la source de la "noirceur" des films ultérieurs - Lang était-il un meurtrier ? Ou était-il “juste” un complice ? Comme Thea Von Harbou a des sympathies nationalistes et nazies évidentes, l'épisode bizarre du suicide est négligé par les autorités, et le détective qui persiste à enquêter finit par se retrouver à Dachau. Le roman n'affirme rien avec certitude, mais les parallèles entre l'histoire de l'Allemagne nazie et l'histoire personnelle de Fritz Lang sont significatifs. Nous ne sommes cependant pas sûrs que Thea a vraiment été tellement maléfique ; des éléments importants manquent à l'histoire, comme son mariage avec Ayi Tendulkar, qui contrevenait à la doctrine nazie. Le dessin d'Eric Liberge (Versailles, Wotan) est spectaculaire, reproduisant l'atmosphère des films de Lang et explorant l'aspect "maudit" de ces années.
VERDICT
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Une biographie intéressante, pleine de détails importants sur l'histoire de l'Allemagne et du cinéma allemand, un bon point de départ pour comprendre la genèse de chefs-d'œuvre comme Dr. Mabuse, Metropolis et M le Maudit.