Scénario : Benjamin Von Eckartsberg
Dessin : Thomas Von Kummant
Précaire n'est pas du tout un terme pour décrire la situation dans laquelle se trouvent les dispersés autour de l'insoumis Archer. Après tout, l'esprit rebelle a été expulsé sous de fausses accusations (il aurait violé la jeune Céline, mais en réalité, il s'agissait bien sûr du méchant chef de l'approvisionnement Bagster) dans le monde extérieur menacé par les déchiqueteurs, pour y lutter pour sa survie. Son frère Zack, la jeune Yuki et Salim le retrouvent lors d'une opération de sauvetage audacieuse, mais ils tombent entre les mains des bannis, les derniers survivants du monde extérieur, qui attaquent les trains de ravitaillement vers les camps et interceptent les livraisons d'armes. Mais c'est alors que le père de Yuki, Tanaka, change la donne : le samouraï élimine tous les bannis et ramène les enfants dispersés vers Fort Apache. En chemin, on constate cependant que le fléau des rippers est encore plus grand que prévu : apparemment, des spécimens vraiment monstrueux les ont rejoints, pour lesquels les animaux précédents ne sont au mieux qu'une source de nourriture bienvenue. Lorsque l'on s'approche du camp, l'accueil est loin d'être chaleureux. En effet, les jeunes, sous la direction de Holden, ont pris les choses en main, tandis que la commandante du camp Kingsten et ses hommes sont partis à la recherche de l'armement dont ils ont tant besoin. Bagster a été pris en otage et exige la réhabilitation d'Archer et la destitution de Kingsten. Cela semble bien au début, mais Holden développe des traits de plus en plus mégalomanes et dictatoriaux : lorsque Tanaka et Yuki s'approchent du camp, il abat sans hésiter le vieux samouraï, représentant de la génération des parents qu'il déteste. Alors que Zack et Archer s'apprêtent à retourner au camp avec les armes, la catastrophe toujours attendue se produit : une marée de rippers, menée par d'énormes animaux de tête, attaque Fort Apache...
La conclusion en fanfare de la saga de Benjamin von Eckartsberg et Thomas von Kummant amène tous les conflits et menaces mis en place à un final véritablement enflammé. Les tensions entre les jeunes et les anciens s'exacerbent complètement lors de la prise de pouvoir par les jeunes restés au fort, qui, sous la direction de Holden, font d'abord une fête sauvage et font un doigt d'honneur aux parents qui les regardent avec étonnement. Mais bientôt, la quête de justice glisse vers une tyrannie sanglante, dans laquelle Holden devient de plus en plus un chef fasciste qui ne connaît plus de valeurs et qui tue pour le pouvoir. Aveuglé par ses premiers succès, il sous-estime complètement la menace que représentent les rippers qui foncent sur lui ("Reculer, c'est pour les vieux et les lâches"), renforcés par des spécimens géants manifestement mutants, que rien ne peut arrêter. Pour le reste, il n'y a guère d'espoir d'entente entre les générations : à peine Yuki retrouve-t-elle émotionnellement son père aliéné que cette harmonie est activement détruite par Holden. La bataille finale autour de Fort Apache se transforme alors complètement en un spectacle de monstres de la fin des temps, dans lequel jeunes et vieux se défendent contre les "bêtes de King Kong" à l'aide de mitraillettes, de katanas et de bazookas ( !) - le camp porte donc encore une fois bien son nom, même si ce ne sont pas des Peaux-Rouges qui attaquent, mais de véritables monstres. Il n'y a pas de happy end, presque tout le monde en prend pour son grade et il ne reste plus qu'à chercher une nouvelle forteresse malgré la constatation amère de Kingsten : "Ce ne sont pas les rippers qui ont fait tomber la colonie" - le monde extérieur ne changera pas. Visuellement, toute la fête de Thomas von Kummant est à nouveau mise en scène de manière rapide, grand format et éclatante, les mots et les images formant souvent un mariage réussi : lors d'une fête débridée des jeunes, les paroles du vieux cheval de bataille des Beastie Boys "Fight for your right (to party)", qui résonne dans les haut-parleurs du camp, s'étendent sur quelques pages, reflétant de manière amusante le rejet provocateur de l'ancienne génération qui observe dehors avec stupéfaction.
VERDICT
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C'est ainsi que s'achève dans un grand fracas une ronde qui - on a du mal à le croire - a débuté en 2014 avec le volume inaugural "Brebis Galeuses". On attend avec impatience de voir ce que le duo créatif à l'origine de la "Chronique des immortels" va inventer comme prochain grand projet.