Dans le Serpent et la Lance, nous sommes transportés dans une civilisation perdue, celle des Aztèques. Nous sommes en 1454, bien avant l'arrivée des Espagnols, et l'empire aztèque n'est donc pas encore menacé de l'extérieur. Et pourtant, il y a la famine, il ne pleut pas, des masses de sacrifices humains sont apportées aux dieux sans résultat. Quelque part dans la campagne vit le marchand de plumes Œil-Lance. Un jour, un garçon arrive de la capitale, Tenochtitlan. Il est envoyé par le grand prêtre Cozatl avec une demande urgente à Œil-Lance de venir à la capitale. Une fois à Tenochtitlan, il se rend au temple et rencontre Cozatl. Ce dernier a fait venir son ami en ville pour l'aider à résoudre une série de meurtres mystérieux. Les victimes sont tuées rituellement et momifiées. La méthode est assez similaire à celle des prêtres. Il est donc dans leur intérêt de détourner les soupçons d'implication. Mais Cozatl nous apprend alors que Œil-Lance enquête en même temps que Serpent, un camarade de classe maléfique du passé qui travaille maintenant directement pour l'Empereur. Les progrès de Oeil-Lance sont lents. Il commence à réaliser de plus en plus que la solution aux meurtres se trouve dans son passé, mais dans sa tête, cela ne cesse de bloquer. Dans ce troisième tome, Oeil-Lance et Serpent vont devoir mettre de côté leur détestation mutuelle pour faire avancer l'enquête sur les jeunes filles momifiées retrouvées aux quatre coins de l'Empire Aztéque. Cette affaire, au-delà de son horreur intrinsèque, touche désormais la petite-fille du conseiller du souverain, Cinq-Fleurs, qui est aussi la nièce de Serpent. Les deux ennemis d'enfance doivent donc se hâter notamment en essayant de faire parler la seule survivante.

De temps en temps, vous voyez une bande dessinée qui vous fait immédiatement penser : ce sera un classique. Et une telle bande dessinée est Le Serpent et la Lance. Non seulement ce scénario est très ingénieux et passionnant, mais le dessin est également d'une beauté indescriptible. Parce qu'il s'agit du passé, ces dessins sont sobrement colorés, avec une teinte rappelant le sépia. Mais quand il s'agit de sacrifice humain, le sang rouge s'illumine dans les dessins. Tout est raffiné : la couleur des vieilles photographies, qui nous transporte dans le passé ; le cadre sobre, qui traduit la dureté de la vie ; l'immobilité des images, qui suggère qu'il n'y a aucune perspective de changement. De nombreux dessins transmettent une atmosphère. Ce n'est qu'en les observant plus longuement que l'on comprend comment ils fonctionnent. Un champ de maïs ou de blé, avec des gens joyeux (notes de musique dans les bulles de texte) et beaucoup de jaune dans la coloration, de sorte que vous vous sentez automatiquement un peu plus ensoleillé. Et juste à ce moment-là, le désastre frappe. Les dessins de Hub sont également délicieux. Il a l'œil pour les détails et certains des plus grands dessins sont de véritables images d'observation. On peut voir dans ses grands yeux qu'il est influencé par les artistes de mangas. Les expressions faciales sont parfois un peu trop audacieuses à mon goût. D'un autre côté, cela donne aussi de la clarté, ce qui est agréable à lire. La mise en couleurs est faite par Li, elle est atmosphérique, efficace, soutenant l'histoire. Outre le fait que le décor, l'empire aztèque au milieu du XVe siècle, offre au créateur de grandes possibilités de jouer au sommet de son art, Hub a réussi à vous rallier immédiatement aux personnages principaux et à vous faire détester ses adversaires. Quel a été le véritable rôle du conseiller du souverain ? Qui est ce personnage qui apparaît dans ce nouveau tome ? Oeil-Lance va-t-il trouver des réponses dans ses rêves et dans son passé? A quoi joue réellement Cozatl? Nous n'aurons pas toutes les réponses et nous avons déjà hâte de lire les deux prochains tomes pour enfin délier toute cette affaire.